Destins Croisés : Les Générations en Évolution

Prologue

Le let's play que vous allez lire est une partie que j'avais commencée sans prétention, simplement pour me donner un coup de boost dans mes idées et me changer les idées. Au départ, je voulais juste jouer tranquillement, sans intention d'en faire un SimLit... mais je n'ai pas pu m'en empêcher.

J'ai décidé de jouer une semaine avec chacun des personnages principaux : CyCy, Isabelle, Kilian et enfin Romain. Je ne joue pas leurs parents, laissant le jeu gérer leur destin afin d'ajouter un peu de piment et d'éviter que tout soit trop prévisible. Je n'avais pas d'attentes particulières en lançant cette partie, juste l'envie de voir mes personnages vivre de belles vies. Mais comme toujours, le jeu a mis son grain de sel, transformant leur parcours en une aventure pleine de surprises.

Ce récit est structuré sous deux formes : des articles pour chacun d'eux et une "page" regroupant l'ensemble. Et surtout, je n'ai pas fini de jouer avec eux ! De nombreuses aventures attendent encore chacun d'eux ainsi que leur descendance.

Bonne lecture !




Louise et Jonathan


Louise et Jonathan s’étaient rencontrés jeunes, portés par les mêmes valeurs : le travail, la famille et la persévérance. Ils avaient bâti leur vie sur ces principes, convaincus que c’était ainsi qu’ils offriraient à leurs enfants le meilleur avenir possible. Élever une famille nombreuse n’avait jamais été facile, mais ils avaient tenu bon, malgré les tensions, les incompréhensions et les épreuves du temps.
 
Ensemble, ils avaient eu quatre enfants : Kilian, Romain, Isabelle et CyCy. Chacun d’eux avait eu son lot de révoltes et de questionnements, cherchant à s’émanciper d’une éducation où la rigueur de Louise pouvait parfois sembler pesante. Adolescents, ils avaient tous connu des périodes de conflits, des moments où les échanges tournaient plus souvent à la confrontation qu’à la complicité.
 
Romain, pourtant le plus calme, avait été le premier à partir. Fatigué des disputes et en quête d’indépendance, il avait pris ses distances dès qu’il en avait eu l’occasion, laissant derrière lui un Kilian profondément marqué par cette séparation. Ce départ avait été un choc pour Louise, qui ne s’attendait pas à voir son fils s’éloigner aussi brutalement. Pourtant, avec le recul, elle savait que ce besoin d’espace était une réaction naturelle, une crise passagère qui avait fini par s’apaiser.
 
Kilian, lui, avait pris un autre chemin. D’abord très attaché à la famille, il s’en était détaché progressivement, et ce fut son mariage avec Rosine qui scella la fracture avec sa mère. Louise ne pouvait accepter cette union, jugeant le milieu de Rosine et de sa mère, Rose, indigne d’intérêt. Persuadée que son fils commettait une erreur, elle s’était enfermée dans ses jugements, au point de voir Kilian s’éloigner à son tour. Avec les années, elle avait fini par comprendre que son rejet l’avait privée de précieuses années avec son fils et ses petits-enfants. Mais pouvait-elle encore rattraper le temps perdu ?
 
Isabelle, de son côté, avait adopté une approche bien différente. Pas de disputes éclatantes ni de rupture franche, juste une distance polie, une froideur maîtrisée qui lui permettait de garder le contrôle sur leur relation. Elle voyait Louise par obligation, principalement pour ses enfants, mais ne cherchait ni rapprochement ni conflit. Contrairement à Kilian, elle n’éprouvait pas le besoin de couper les ponts, mais elle n’ouvrait aucune porte non plus.
 
Enfin, il y avait CyCy, la plus fougueuse, celle qui s’était toujours opposée à sa mère. Leur relation avait longtemps été marquée par des désaccords incessants, une lutte d’opinions qui semblait sans fin. Mais avec le temps, même cette opposition s’était transformée en une simple indifférence. Elles se voyaient aux réunions de famille, échangeaient des mots polis, sans plus. Aucune hostilité, mais aucun vrai lien non plus.
 
Aujourd’hui, Louise et Jonathan étaient devenus grands-parents. Avec leurs douze petits-enfants, ils profitaient d’une retraite bien méritée, savourant les moments passés avec leurs proches. Jonathan, toujours aussi bienveillant, servait souvent de pont entre Louise et leurs enfants, apaisant les tensions quand il le pouvait.
 
Louise, quant à elle, oscillait entre regrets et résignation. Elle savait que ses enfants avaient trouvé leur propre voie, qu’ils avaient bâti leur vie en fonction de leurs choix et non des siens. Elle n’était pas toujours d’accord avec eux, mais elle n’éprouvait plus la même volonté de contrôler. Peut-être était ce ça, finalement, la leçon qu’elle devait apprendre : accepter que l’amour parental ne suffît pas toujours à éviter les fractures, et que parfois, il faut savoir laisser ses enfants s’éloigner pour mieux les retrouver un jour.


CyCym

Semaine 1

CyCym ajusta ses lunettes de soleil et jeta un coup d'œil à ses enfants qui couraient autour du salon. Etàn, devenu enfant, faisait des bêtises avec Maé, qui n’était qu’à quelques jours de l'enfance, tandis qu'Anton, fraîchement devenu bambin, babillait joyeusement. La maison bourdonnait de vie et de bruits, un tourbillon habituel qui, malgré l'amour qu’elle portait à ses enfants, commençait à peser sur CyCym.

Elle soupira en s’accordant une gorgée de café. Son quotidien était bien rempli, et elle avait peu de temps pour s’attarder sur des choses qu’elle ne pouvait pas changer. Sa relation avec Louise en faisait partie. Il n’y avait pas de guerre ouverte entre elles, mais pas de réel lien non plus. Elles se voyaient parfois lors d’événements familiaux, échangeaient quelques mots polis, et repartaient chacune de leur côté, comme des connaissances que la vie avait placées sur le même chemin sans vraiment les rapprocher.

Ce jour-là, CyCym avait proposé à sa mère de se retrouver à la brocante de San Myshuno. Pas dans l’espoir d’une grande conversation ou d’une réconciliation, simplement pour maintenir ce fil ténu qui les reliait encore.

Quand elle arriva sur les lieux, elle chercha Louise parmi la foule et la repéra rapidement, debout près d’un stand, le regard absent. CyCym s’approcha sans empressement.

"Salut, merci d’être venue."

Louise hocha la tête sans répondre immédiatement, observant un vieux bibelot sur la table devant elle. "Je passais dans le coin, alors autant en profiter."

Le silence s’installa un instant, sans malaise, mais sans chaleur non plus. CyCym n’essaya pas de combler ce vide. Elle savait que leur relation ne changerait pas, et ça lui convenait ainsi.

Elles flânèrent un moment entre les étals, échangeant quelques remarques sur les objets exposés, avant que Louise ne décide de partir.

"Je vais y aller," annonce-t-elle simplement.

"Ça marche. À une prochaine fois."

Louise hocha la tête et s’éloigna, sans effusion, sans promesse de se revoir bientôt. CyCym la regarda partir, puis reprit tranquillement sa balade parmi les stands. Ce n’était ni un moment fort ni un échec. Juste une interaction de plus, fidèle à ce qu’avait toujours été leur relation.

Mais la vie de CyCym ne tournait pas autour de sa mère. Ses priorités étaient ailleurs, auprès de ses enfants, de LagriFred, et même de Sören, qui avait fini par rejoindre leur foyer contre toute attente. Élever trois enfants, bientôt quatre, n’était pas une mince affaire, et elle devait constamment jongler entre les responsabilités et son besoin de souffler un peu.

Chaque jour apportait son lot de défis, de fatigue et de moments fugaces de bonheur. Peut-être que tout ne serait jamais parfait, mais au fond, ce n’était pas ce qu’elle cherchait. Elle voulait juste avancer, à son rythme, sans attentes irréalistes, sans drames inutiles. Juste vivre, tout simplement.



Semaine 2

La semaine qui suivit le déménagement fut un tourbillon d’activités et d’émotions pour CyCy. L’installation dans la nouvelle maison, plus spacieuse et adaptée à la vie de famille nombreuse, avait demandé toute son énergie. Mais ce qui l’avait le plus marquée, ce n’était pas tant la logistique ou les cartons, mais plutôt l’invitation inattendue de Louise. Une invitation qui, à première vue, semblait banale, une simple journée détente. Mais pour CyCy, c’était bien plus que cela.

 

Elle avait vu dans ce geste un désir de renouer, une tentative timide d’aller au-delà des non-dits et des années de distance. Cela ne signifiait pas forcément qu’elles allaient se rapprocher, mais c’était un signe que, peut-être, les choses pouvaient changer, ne serait-ce qu’un peu. Mais l’émotion l’avait submergée lorsqu’elle avait franchi le seuil de la porte de Louise ce jour-là. L’atmosphère était différente. Pas de tension palpable, pas de regards fuyants. Juste une journée où, pour une fois, elles étaient capables de profiter du moment sans le poids du passé.

 

CyCy n’avait pas prévu que cette journée se passerait si bien. Elle s’était laissé aller à rire, à discuter de tout et de rien, et même si elles n’étaient pas devenues proches, il y avait eu une sorte de légèreté qui avait effleuré leurs échanges. Elle n’avait pas eu l’impression de devoir tout analyser, de chercher la signification cachée derrière chaque mot ou chaque geste. C’était comme si le temps, d’un coup, s’était arrêté, leur permettant de respirer loin des conflits et des incompréhensions.

 

En rentrant chez elle ce jour-là, CyCy ne pouvait s’empêcher de repenser à la scène. Elle se sentait partagée entre l’espoir que cela puisse marquer un tournant et la crainte que tout ceci ne soit qu’un simple éclat dans une relation encore fragile. Mais au fond, elle se sentait reconnaissante pour ce moment. Un moment où, pour une fois, elle n’avait pas eu à lutter contre des souvenirs douloureux. Juste l’instant présent, dans toute sa simplicité.

 

Le reste de la semaine se déroula dans un tourbillon d'événements. Les jumeaux, Anton et Maé, étaient devenus enfants et avaient fait leur rentrée en primaire, une étape marquante pour CyCy qui voyait ses enfants grandir trop vite. Puis, quelques jours plus tard, Sören était devenu bambin. Il était si adorable avec ses yeux écarquillés, ses premiers mots maladroits et ses petits pas hésitants. Chaque moment passé avec lui était un instant précieux, comme un souffle d’air frais dans la frénésie du quotidien.

 

Et puis, il y avait Etàn. Ce moment où il était devenu adolescent avait été, pour CyCy, un peu plus difficile à accepter. Chaque étape du passage de l’enfance à l’adolescence semblait marquer un éloignement, un pas de plus vers l’indépendance. Etàn était désormais un jeune adulte en devenir, avec ses propres idées, ses propres rêves. Il n’était plus le petit garçon qui courait dans les bras de sa mère à la recherche de protection et de tendresse. Mais CyCy était fière de lui, de sa maturité naissante. Et, dans un élan de tendresse, elle lui avait offert un sourire, une caresse sur la tête, comme pour lui dire qu’elle serait toujours là, même si les choses changeaient.

 

Cette semaine marqua donc un tournant, non seulement dans la dynamique familiale mais aussi dans la relation de CyCy avec Louise. Peut-être que ce n’était pas la fin des tensions, mais c’était un début. Un petit pas vers quelque chose de plus serein, un espace où elles pourraient enfin respirer, sans le poids du passé.

 

CyCy prit une grande inspiration en pensant à tout cela. Les choses étaient en mouvement, tout comme ses enfants, tout comme elle. Peut-être que le plus important, au fond, était de continuer à avancer, tout simplement, sans trop chercher à comprendre. La vie suivait son cours, et elle comptait bien l’apprécier à sa manière.




Semaine 3

CyCy avait toujours su que la vie réservait son lot d’épreuves, mais voir son frère traverser une rupture aussi brutale et inexpliquée la laissait avec un goût amer. Romain était dévasté, perdu face à l’abandon de Laure et surtout face à l’indifférence glaçante qu’elle manifestait envers leurs filles. CyCy ne pouvait pas rester les bras croisés. Elle prit les choses en main.

D’abord, elle contacta leurs frères et sœurs. Romain avait besoin d’un soutien solide, et elle savait que la fratrie, malgré les distances et les vies bien remplies, saurait répondre présent. Puis, sans en parler à personne, elle décida d’aller confronter Laure elle-même. Elle devait comprendre. Pas seulement pour Romain, mais aussi pour Alix et Lou, qui se retrouvaient du jour au lendemain sans mère.

Quand elle arriva chez Laure, cette dernière ouvrit la porte avec un regard fatigué, comme si elle s’attendait à cette visite.

— Je savais que tu viendrais, souffla-t-elle en s’écartant pour la laisser entrer.

CyCy ne perdit pas de temps en politesses.

— Pourquoi ? Pourquoi tu es partie comme ça, sans un mot, sans un regard pour tes filles ?

Laure sembla hésiter, se mordant la lèvre comme si elle cherchait les bons mots. Puis, d’une voix presque inaudible, elle lâcha :

— Parce que je n’ai jamais aimé Romain.

CyCy resta figée.

— Quoi ?

— Je n’ai jamais ressenti d’amour pour lui… Je voulais y croire, j’ai essayé, pendant des années. Mais ce n’était pas là.

Le choc fut brutal.

— Et les filles ? demanda CyCy d’une voix tremblante.

Le silence s’étira, lourd, pesant. Laure baissa les yeux.

— Pas plus.

CyCy sentit une vague de colère monter en elle.

— Tu es en train de me dire que tu n’as jamais aimé Alix et Lou ? Que tu les as élevées en faisant semblant ?

— Je ne voulais pas me l’avouer, murmura Laure. J’ai lutté contre ces non-sentiments, j’ai fait de mon mieux pour être la mère qu’elles méritaient. Mais au fond… ce n’était pas naturel. Je ne ressens rien pour elles. Rien.

Un frisson parcourut CyCy. Elle tenta de calmer son souffle, de ne pas exploser.

— Et maintenant ? Tu comptes juste disparaître ?

— Je veux bien parler à Romain… essayer de lui expliquer. Mais les filles… comment leur dire ça ? Comment leur avouer que leur propre mère ne les a jamais aimées ?

Laure semblait sincèrement troublée. Elle détourna le regard, mal à l’aise.

— Parfois, je me demande si quelque chose ne va pas chez moi… si je ne suis pas malade. Quelle mère fait ça ?

CyCy n’avait pas de réponse à lui offrir. Elle était encore trop secouée.

— Tu devrais consulter quelqu’un, dit-elle simplement. Pas pour te trouver des excuses, mais pour comprendre.

Laure hocha la tête, pensive.

CyCy quitta l’appartement avec un poids sur le cœur. Romain devait savoir, mais comment pourrait-il encaisser une vérité aussi cruelle ? Et surtout, que ferait-elle pour protéger ses nièces de cette révélation ?

En rentrant chez elle, elle trouva LagriFred absorbé par la gestion des logements qu’ils avaient acquis. Depuis plusieurs mois, les lieux étaient négligés par l’ancien propriétaire, et il s’occupait exclusivement des locataires pour remettre les choses en ordre. CyCy lui raconta tout.

— C’est une situation de merde, souffla-t-il après un long silence.

— Oui, et je ne sais pas comment on va s’en sortir…

Il lui serra la main, un soutien silencieux mais précieux.

Pendant ce temps, Sören grandissait. L’enfant qu’elle avait accueilli presque par surprise était désormais un bambin plein de vie, s’émerveillant du monde qui l’entourait. En le regardant rire, CyCy se demanda comment on pouvait ne rien ressentir pour son propre enfant. Elle n’avait pas la réponse, mais une chose était sûre : Alix et Lou ne seraient jamais seules. Elle s’en assurerait, coûte que coûte.




Isabelle

Semaine 1

Isabelle, la sœur de CyCym, avait toujours cultivé une certaine distance avec Louise. Contrairement à ses frères et sœurs, elle n’avait jamais cherché l’affrontement. Pas de cris, pas de disputes ouvertes. Juste une froideur polie, une barrière invisible qu’elle entretenait avec soin. Louise était sa mère, certes, mais cela ne voulait pas dire qu’elle devait occuper une place centrale dans sa vie.

Elle acceptait de la voir lors de rares moments familiaux, principalement pour ses enfants. Elle ne se faisait pas d’illusions : les tensions ne disparaîtraient jamais complètement, mais elle n’éprouvait ni le besoin ni l’envie de raviver des conflits inutiles. C’était ainsi qu’Isabelle gérait les choses – avec calme et pragmatisme.

Son quotidien, bien rempli, ne laissait de toute façon pas beaucoup de place aux drames familiaux. Employée dans les pompes funèbres, elle avait appris à côtoyer la mort avec une sérénité qui en perturbait plus d’un. Orion, son mari, évoluait dans un tout autre univers. Espion légendaire, il disparaissait parfois du jour au lendemain, emporté par des missions dont Isabelle ne cherchait pas à connaître les détails. Ils s’étaient habitués à ce mode de vie, trouvant leur équilibre entre secrets et discrétion.

Mais ce soir-là, quelque chose d’inhabituel se produisit.

Orion rentrait chez lui lorsqu’il sentit une présence étrange. En levant la tête, il aperçut des lueurs éthérées au-dessus de lui. Il n’eut pas le temps de réagir. Une force invisible le souleva du sol, son corps se figea, son cri resta coincé dans sa gorge. Puis, le néant.

Lorsqu’il reprit connaissance, il était allongé sur le trottoir, juste devant leur maison. Une sensation étrange parcourait son corps, un trouble qu’il ne parvenait pas à définir. Quelque chose avait changé.

Les jours passèrent, et peu à peu, la réalité s’imposa : Orion était enceint. Une grossesse improbable, inexplicable. Une certitude s’installa en lui – l'œuvre des extraterrestres de Lexam.

Lorsqu’il annonça la nouvelle à Isabelle, elle resta silencieuse. Son regard s’attarda sur lui, cherchant à mesurer l’ampleur de ce qu’il lui disait. Pas de panique, pas d’explosion d’émotions. Juste une analyse froide des faits.

« D’accord », finit-elle par dire.

Elle ne doutait pas de son mari, ni de la véracité de son récit. À quoi bon remettre en question l’évidence ? Orion était enceint, c’était un fait. Ce qu’ils allaient en faire, c’était une autre histoire.

Avec le temps, Isabelle se fit à l’idée. Ni enthousiasme débordant ni rejet catégorique. Ce bébé allait arriver, et elle l’accueillerait comme il se devait. Pas besoin de chercher une logique là où il n’y en avait pas. Elle ne croyait pas aux miracles, mais elle croyait en son mari, et cela suffisait.

Lorsque CyCym apprit la nouvelle, elle eut du mal à cacher sa surprise. Son expression trahissait ce qu’Isabelle ne disait pas tout haut : c’était étrange, c’était perturbant, mais après tout, qu’y pouvaient-ils ?

La vie leur avait imposé un mystère. Il ne leur restait plus qu’à l’accepter.




Semaine 2

La routine bien huilée d’Isabelle et Orion s’était poursuivie avec une efficacité presque déconcertante. Leur foyer, où le silence et l’ordre régnaient en maîtres, était un équilibre qu’ils avaient su construire avec rigueur. Pourtant, cette semaine marqua un tournant discret mais significatif dans leur existence.
 
Tout d’abord, sur le plan professionnel, Isabelle et Orion atteignirent tous deux le sommet de leur carrière respective. Pour Isabelle, cela signifiait une reconnaissance incontestée de son expertise dans les pompes funèbres. Avec son calme imperturbable et son professionnalisme, elle était devenue une référence, une figure respectée dans son domaine. La mort n’avait jamais eu de prise sur elle, et elle savait mieux que personne accompagner les familles endeuillées sans se laisser envahir par l’émotion.
 
Orion, quant à lui, avait atteint le sommet de l’espionnage. Son nom résonnait dans les sphères les plus secrètes du gouvernement, et bien que son travail ne puisse être évoqué à voix haute, Isabelle savait qu’il était parvenu là où peu osaient rêver. Ce succès n’avait rien changé à leur quotidien : Orion disparaissait toujours pour ses missions, revenait parfois avec un regard plus sombre, mais il gardait cette distance maîtrisée avec son métier. Il était un homme de l’ombre, et Isabelle n’avait jamais cherché à percer ses mystères.
 
Leur ascension professionnelle coïncida avec une période particulièrement sereine pour leurs enfants. Anton, qui venait de franchir le cap de l’enfance, se montrait studieux et appliqué. Son passage en primaire s’était fait sans heurts, et il impressionnait déjà ses enseignants par son sérieux. Benton, quant à lui, avait quitté le monde des nourrissons pour celui des bambins. Sa nature extraterrestre, soigneusement dissimulée sous un déguisement humain, passait inaperçue aux yeux des voisins. Isabelle savait que cet artifice ne durerait pas éternellement, mais pour l’instant, il permettait de préserver la tranquillité de leur foyer.
 
Cette semaine là, l’école leur envoya plusieurs notes positives : Anton excellait, Benton se développait normalement, et tout indiquait que la fratrie évoluait dans une dynamique harmonieuse. Pas de crise, pas d’imprévu majeur, juste une continuité paisible.
 
Isabelle prenait cette période avec son pragmatisme habituel. Elle n’attendait ni rebondissements, ni coups du sort, et elle se contentait d’apprécier cette stabilité que tant d’autres recherchaient désespérément. Pourtant, une pensée la traversa un soir, alors qu’elle rangeait un dossier sur son bureau : que restait il à atteindre désormais ?
 
L’ambition avait guidé leurs pas jusqu’ici, mais avec la réussite professionnelle et la sérénité familiale, qu’y avait-il encore à viser ? Elle n’avait pas de réponse immédiate à cette question. Peut-être était ce simplement le début d’une nouvelle étape, plus calme, plus posée. Une période où, enfin, ils pourraient se contenter de vivre sans chercher à prouver quoi que ce soit.
 
En attendant, la vie suivait son cours, imperturbable, et Isabelle n’avait pas l’intention de la bousculer.





Semaine 3

La vie d’Isabelle suivait son cours, méthodique et ordonnée, comme elle l’avait toujours voulu. Pourtant, cette semaine fut marquée par plusieurs événements qui vinrent bousculer son quotidien bien réglé.

Tout d’abord, il y avait Sohane, dont la passion pour la confection de jus de fruits maison était devenue une véritable obsession. Chaque jour, elle expérimentait de nouvelles recettes, mélangeant fruits et épices avec un enthousiasme débordant. Isabelle, d’ordinaire peu encline à encourager des excentricités, avait fini par admettre que cette activité rendait sa fille heureuse. Alors, elle la laissait faire, non sans garder un œil attentif sur l’état du plan de travail, qui se transformait régulièrement en champ de bataille collant et sucré.

Mais au-delà de la douceur des jus de fruits, un sujet plus sérieux s’imposa à Isabelle. Malgré ses principes et sa tendance à éviter les conflits inutiles, elle ne pouvait rester indifférente à ce qui était arrivé à Romain. La disparition soudaine de Laure et son abandon des enfants l’avaient profondément troublée. Elle avait donc pris sur elle d’aller mettre les choses au clair.

Leur confrontation fut brève, mais lourde de sens. Laure, visiblement épuisée, n’opposa pas de résistance. Elle confessa qu’elle n’avait jamais aimé Romain et que ses sentiments absents s’étaient également étendus à leurs filles. Une révélation qui, loin de susciter de la colère chez Isabelle, lui inspira un profond mépris mêlé de lassitude. Comment pouvait-on renier ainsi sa propre famille ?

"Peu importe ce que tu ressens ou non," avait-elle déclaré froidement. "Le mal est fait. Et un jour, tu devras vivre avec les conséquences."

Elle ne chercha pas à obtenir d’excuses ni même à prolonger l’échange. Laure ne méritait pas plus de son temps.

De retour chez elle, Isabelle retrouva Orion plongé dans sa quête personnelle. Son mari, toujours enclin à suivre les méandres de sa propre réflexion, passait de longues heures à visiter des musées, absorbant chaque détail des œuvres exposées, cherchant à nourrir son esprit et son âme. Quand il n’était pas dans une galerie, il s’élançait dans de longs joggings à travers la ville, poursuivant un objectif qu’il était le seul à comprendre.

Isabelle observait cela avec un mélange d’amusement et d’indifférence. Orion avait toujours été ainsi, un homme de l’ombre guidé par des aspirations profondes et silencieuses. Elle ne cherchait pas à l’arrêter ni à comprendre sa démarche. Elle se contentait de le laisser suivre son chemin, comme elle suivait le sien.

Ainsi, cette semaine, entre les jus de Sohane, la confrontation avec Laure et les errances philosophiques d’Orion, Isabelle prit conscience d’une chose : elle appréciait sa vie telle qu’elle était. Ordonnée, stable, prévisible. Et rien, pas même les drames familiaux ou les quêtes existentielles de son mari, ne viendraient troubler cet équilibre qu’elle chérissait tant.



Kilian

Semaine 1

Kilian, de son côté, avait toujours eu une relation compliquée avec Louise. Entre eux, les tensions avaient toujours existé, mais elles s’étaient aggravées lorsqu’il avait osé fréquenter – et pire encore, épouser – Rosine, dont la mère, Rose, avait participé à Sim Story, une télé-réalité que Louise méprisait profondément. Pour elle, cette union était une aberration. Elle refusait d’accepter que son fils puisse aimer une femme issue de ce monde qu’elle jugeait superficiel et indigne d’intérêt.

Mais Louise était aveuglée par ses préjugés et n’avait jamais vu l’essentiel : Kilian et Rosine s’aimaient d’un amour sincère et profond, un amour qui n’avait fait que se renforcer avec la naissance de leurs enfants. Plutôt que de se réjouir, Louise avait rejeté en bloc cette famille, nourrissant une rancœur tenace envers Rosine et affichant un mépris à peine voilé pour sa belle-mère, Rose.

Face à cette situation, Kilian avait fini par prendre ses distances. Pendant longtemps, il avait cru que couper les ponts était la seule solution, la meilleure façon de protéger sa famille des jugements de Louise. Et pourtant… au fond de lui, une part de lui hésitait encore.

Aujourd’hui, Kilian mène une existence paisible aux côtés de Rosine et de leurs enfants. Rosine, décoratrice d’intérieur talentueuse, voit sa carrière s’envoler, tandis que Kilian s’épanouit pleinement en tant que professeur. Leurs enfants grandissent entourés d’amour et de bienveillance, loin des tensions familiales qui, autrefois, pesaient sur eux. Camélia, leur fille studieuse, à peine rentrée de l'école, se met immédiatement à faire ses devoirs sans qu'on ait besoin de lui rappeler, tandis qu’Ayden, son petit frère plein d’énergie, la suit partout avec enthousiasme. Camélia invente toujours de nouvelles histoires pour amuser Ayden, et leur complicité illumine la maison.

Kilian sait qu’il a fait le bon choix en construisant son propre bonheur, à sa façon. Mais parfois, une pensée persistante s’immisce dans son esprit. Sa mère a-t-elle changé ? Regrette-t-elle leur éloignement autant que lui ? Par fierté, il n’ose pas faire le premier pas, et il doute que Louise le fasse. Mais si elle venait à frapper à sa porte un jour… serait-il prêt à lui ouvrir ?




Semaine 2

La vie de Kilian et Rosine suivait un cours paisible, rythmé par leur travail, l’éducation de leurs enfants et la complicité qui les unissait. Pourtant, cette deuxième semaine fut marquée par de grands bouleversements.
 
Tout d’abord, Ayden, leur cadet, franchit une nouvelle étape en grandissant. Curieux et plein d’énergie, il débordait d’imagination et passait encore plus de temps avec sa grande sœur Camélia, partageant avec elle de longues histoires inventées. Leur maison résonnait de leurs rires et de leurs jeux, remplissant le cœur de leurs parents de fierté.
 
Kilian, de son côté, atteignit l’apogée de sa carrière dans l’éducation. Après des années de dévouement et d’investissement, il décrocha enfin la dernière promotion, devenant une référence dans son domaine. Pourtant, alors qu’il aurait dû savourer cette réussite, une crise inattendue s’abattit sur lui : la fameuse crise de la quarantaine. Comme une tornade, elle le traversa avec des exigences absurdes et un besoin viscéral de changement. Heureusement, en l’espace de deux jours, cette tempête intérieure se dissipa presque aussi vite qu’elle était apparue, lui laissant un léger sourire en y repensant.
 
Mais à peine avait-il retrouvé son équilibre que ce fut au tour de Rosine d’être prise dans le tourbillon d’un tournant existentiel. Son propre besoin de renouveau prit une tournure bien plus concrète lorsqu’elle se retrouva face à un choix inattendu. Le puits aux souhaits, dans un caprice du destin, lui offrit une opportunité unique : adopter un enfant, et ce, gratuitement. Mais le temps lui était compté. Sans attendre, et sans même consulter Kilian – non pas par défi, mais parce qu’elle sentait, au plus profond d’elle, que c’était la bonne décision –, elle se rendit sur l’ordinateur et fit son choix. Quelques heures plus tard, la petite Eva, un nourrisson aux grands yeux curieux, rejoignait leur famille.
 
Kilian ne lui en tint pas rigueur. Il comprenait Rosine et savait que son choix était fait avec amour. Mais avec cette nouvelle arrivée, la maison commença à sembler trop étroite. De plus, la pluie incessante alourdissait l’ambiance, les confinant plus souvent à l’intérieur qu’ils ne l’auraient voulu.
 
Alors, dans un nouvel élan de changement, Kilian et Rosine décidèrent de prendre un nouveau départ. Ils firent leurs valises et s’installèrent à Sulani, là où l’air était plus léger, où le soleil illuminait l’horizon et où leurs enfants pourraient grandir au rythme des vagues. Un nouveau chapitre commençait pour eux, empreint de promesses et d’aventures à venir.
 
Et tandis que Kilian contemplait l’océan depuis leur nouvelle terrasse, il se demanda une dernière fois si sa mère, Louise, aurait un jour sa place dans ce tableau idyllique. Mais pour l’heure, il choisit de ne pas y penser. Il avait sa famille, son bonheur, et un avenir radieux à savourer.






Semaine 3


Après avoir traversé une crise de la quarantaine intense, Rosine s’était enfin recentrée sur elle-même. Mais plutôt que de s’accorder un moment de répit, elle s’était immédiatement lancée dans un nouveau défi : son propre parcours de l’âme. Animée par une quête de sens, elle consacra ses journées à la méditation, à l’exploration de philosophies spirituelles et aux pratiques qui, selon elle, l’aideraient à atteindre un nouvel équilibre intérieur. Kilian, habitué à ses élans de passion, la regardait faire avec un mélange de curiosité et d’amusement. Il respectait sa démarche, même s’il se contentait d’observer à distance, préférant rester ancré dans le concret.
 
En parallèle, ils avaient organisé un dîner familial, une rare occasion de réunir tout le monde autour d’une même table. L’ambiance fut globalement agréable, malgré quelques tensions sous-jacentes, mais une absence pesa sur la soirée : Louise. Invitée comme tout le monde, elle avait décliné sans donner de réelle explication. Kilian n’en fut pas surpris, mais un pincement au cœur subsistait. Il aurait aimé qu’elle fasse un pas, qu’elle saisisse cette opportunité pour apaiser leur relation. Mais encore une fois, elle était restée fidèle à elle-même, refusant d’affronter ce qu’elle n’était pas prête à accepter.
 
Cependant, ces préoccupations furent rapidement balayées par un événement bien plus marquant. En pleine nuit, le volcan de Sulani entra en activité. Rien de dramatique, mais suffisamment pour provoquer des dégâts considérables. Lorsque Kilian et Rosine revinrent chez eux après l’évacuation temporaire, il ne restait plus que des ruines de leur maison. Un spectacle désolant, et pourtant, une part d’eux ne pouvait s’empêcher de ressentir un certain soulagement. Personne n’avait été blessé, et au fond, peut-être était-ce un signe qu’il était temps pour eux de repartir sur de nouvelles bases.
 
Cette idée se renforça lorsque Rosine, après une mésentente avec son patron d’agence, prit une décision radicale : elle quitta son travail de décoratrice d’intérieur pour se tourner vers une tout autre voie. Devenue écologiste, elle se lança avec passion dans la préservation de l’environnement, investissant toute son énergie dans des projets concrets pour protéger Sulani et ses écosystèmes.
 
Son engagement ne passa pas inaperçu. Quelques mois plus tard, une émission célèbre s’intéressa à son parcours et proposa de la suivre pendant plusieurs jours pour documenter son travail. L’épisode fut un succès, mettant en lumière ses initiatives et sa détermination. Mais si la majorité du public fut séduite, certains spectateurs plus sceptiques la soupçonnèrent d’être une actrice, influencés par la télé-réalité de ses parents.
 
Kilian savait que ce genre de critiques pouvait l’agacer, mais il voyait bien que Rosine était passée à autre chose. Peu importaient les jugements, elle se consacrait à ce qui lui tenait à cœur. Et lui, il était fier d’elle. Malgré les épreuves et les imprévus, ils continuaient d’avancer, ensemble, prêts à reconstruire leur avenir sur des fondations encore plus solides.




Romain

semaine 1

Romain avait toujours donné l’image d’un homme calme, posé, presque trop gentil pour qu’on imagine une quelconque rébellion de sa part. Pourtant, c’était bien lui le premier à avoir quitté la maison familiale. Adolescent, il avait ressenti le besoin de s’éloigner, fatigué des disputes incessantes et des incompréhensions avec Louise. À l’époque, il avait cru que rien ne le retenait auprès d’elle, que l’autorité inflexible de sa mère l’empêcherait toujours d’être pleinement lui-même.
Son départ avait été un choc, surtout pour son frère jumeau, Kilian, qui avait été le plus affecté par cette séparation. Mais avec le recul, Romain comprenait que cette période n’avait été qu’une crise passagère, une rébellion comme tant d’autres, amplifiée par les tourments de l’adolescence. Le temps et la distance lui avaient apporté une nouvelle perspective. S’il n’avait pas toujours été d’accord avec sa mère, il voyait désormais les choses avec plus de maturité.

C’est à cette époque qu’il rencontra Laure. Avec elle, il avait trouvé un équilibre, un amour sincère qui l’aidait à avancer sans ressasser le passé. Ensemble, ils poursuivirent leurs études, trouvèrent leur voie et décidèrent de poser leurs valises à Brindleton Bay. La ville côtière leur offrait tout ce dont ils avaient besoin : du calme, un cadre chaleureux et surtout, l’espace nécessaire pour bâtir leur propre famille.

Au fil des années, leur foyer grandit, tout comme leur maison qu’ils agrandirent au gré des naissances. Leur aînée, Alix, était désormais aux portes de l’adolescence, tandis que Lou, encore enfant, et Neige, qui venait tout juste de quitter l'âge des tout-petits, apportaient une douce animation au sein du foyer. Romain et Laure avaient construit un équilibre solide, une vie où le dialogue et la bienveillance remplaçaient les conflits de son passé.

Contrairement à ce qu’il pensait en quittant la maison, Romain n’éprouvait plus de rancœur envers Louise. Il savait désormais que leurs disputes d’autrefois n’étaient que les frictions naturelles entre une mère et son fils en pleine quête d’indépendance. Aujourd’hui, il n’avait plus besoin de fuir quoi que ce soit. Il avait sa propre famille, ses propres valeurs, et même s’il n’était pas particulièrement proche de Louise, il ne ressentait plus d’animosité. Après tout, le passé appartenait au passé, et lui, il avait choisi d’aller de l’avant.





Semaine 2

La maison résonnait encore des éclats de rire et des musiques entraînantes de la fête d’anniversaire. Ce soir-là, Alix et Lou étaient devenues adolescentes, franchissant un nouveau cap de leur vie. Romain et Laure avaient tout organisé pour que ce soit un moment inoubliable, et ce le fut. Les jumelles, ravies de cette nouvelle liberté qui s’offrait à elles, avaient soufflé leurs bougies sous les applaudissements de leurs proches.
 
Mais derrière les sourires et la chaleur de la fête, une distance grandissante s’était creusée entre Romain et Laure. Ce n’était pas un orage soudain, mais une érosion progressive, un éloignement silencieux façonné par la routine, par des journées où ils se croisaient sans vraiment se voir. Pendant longtemps, Romain avait espéré que ce n’était qu’une phase, un passage difficile à surmonter. Il aimait Laure, ou du moins, il voulait croire qu’il l’aimait encore comme avant.
 
Alors, ils avaient essayé. Pour leurs enfants, pour leur histoire, ils avaient tenté de raviver ce qu’ils avaient perdu. Une thérapie de couple, des efforts pour se retrouver… Mais rien n’y faisait. Chaque discussion ramenait aux mêmes silences pesants, aux mêmes incompréhensions. Et puis un jour, Laure avait pris une décision irrévocable.
 
Le divorce.
 
Romain n’avait pas cherché à lutter. Il avait vu dans ses yeux que tout était fini depuis longtemps, peut-être même avant qu’il ne le réalise lui-même. Mais ce qui le frappa le plus, ce ne fut pas la séparation en elle-même. Ce fut ce que Laure devint dans les jours qui suivirent.
 
Derrière la femme qu’il avait aimée tant d’années, il découvrit un pan de sa personnalité qu’il n’avait jamais soupçonné – ou qu’il avait refusé de voir. Une froideur, une indifférence presque brutale envers ceux qu’elle laissait derrière elle. Romain s’attendait à ce qu’ils s’organisent pour le bien des enfants, qu’ils trouvent un équilibre, qu’ils restent des parents unis malgré tout. Mais Laure ne voulut rien de tout cela.
 
Elle partit seule. Sans Alix, sans Lou, sans Neige.
 
Son départ fut un choc pour les enfants. Alix, d’ordinaire si posée, se referma sur elle-même. Lou, plus impulsive, laissa éclater sa colère, refusant de comprendre comment une mère pouvait abandonner ainsi ses filles. Quant à Neige, encore trop jeune pour saisir toute l’ampleur de la situation, elle posait inlassablement la même question : « Elle revient quand, maman ? »
 
Romain, lui, n’eut pas d’autre choix que de rassembler les morceaux et d’avancer. Il n’avait pas le luxe de s’effondrer. Ses filles avaient besoin de lui. Alors, malgré la douleur, malgré la déception, il fit ce qu’il savait faire de mieux : être un père aimant, présent, stable.
 
Il ne savait pas encore de quoi l’avenir serait fait. Mais une chose était sûre : la famille qu’il avait construite restait debout, avec ou sans Laure. Et ça, il en ferait sa force.





Semaine 3

Romain savait que le moment viendrait. Qu’un jour ou l’autre, ses filles voudraient affronter la vérité. Ce jour-là, elles prirent leur décision sans le prévenir. Lou, Alix et Neige partirent voir Laure, leur mère absente, pour obtenir leurs propres réponses.
 
Romain ne découvrit leur démarche qu’après coup, lorsque Lou, la voix grave et déterminée, lui raconta ce qu’il s’était passé. Sohane avait surpris une discussion entre ses parents et Tatie CyCy, et il n’avait pas fallu longtemps pour que les pièces du puzzle s’assemblent. Déterminées à savoir, elles avaient voulu entendre Laure de leurs propres oreilles.
 
Quand elles revinrent, le silence fut pesant. Aucun mot ne fut prononcé immédiatement, mais l’expression de ses filles en disait long. Lou, d’ordinaire si vive, était sombre et silencieuse. Alix, toujours posée, semblait plus lasse que triste. Quant à Neige, elle ne chercha même pas à cacher sa colère. Laure leur avait confirmé ce que CyCy leur avait déjà révélé : elle ne les avait jamais aimées. Elle n’avait même pas essayé de prétendre le contraire.
 
— Elle nous a dit qu’on méritait mieux qu’une mère qui fait semblant, souffla Alix.
 
Romain serra les poings mais garda son calme. Il leur laissa le temps de digérer, prêt à les soutenir du mieux qu’il pouvait. Cette fois, il n’y avait plus d’illusions, plus de faux espoirs. Laure appartenait définitivement au passé.
 
Et la vie continua. Comme toujours.
 
Cette semaine là, un événement inattendu secoua leur quotidien : un cambrioleur tenta de s’introduire chez eux en pleine nuit. Mauvais choix. La police, alertée immédiatement, arriva avant même qu’il ne puisse franchir le seuil. L’individu fut arrêté sur-le-champ, laissant la famille plus amusée qu’effrayée par cette tentative maladroite.
 
Mais tous les dangers n’étaient pas aussi facilement maîtrisables. Peu de temps après, Lou, encore troublée par sa confrontation avec Laure, commit une erreur en cuisinant. Une flamme s’éleva brusquement de la cuisinière, embrasant les alentours en un éclair. Heureusement, Romain, alerté par l’odeur de brûlé, intervint aussitôt. Il maîtrisa l’incendie avant qu’il ne se propage davantage, et Lou, terrifiée mais indemne, reçut une belle leçon de prudence.
 
Malgré ces péripéties, un événement heureux vint illuminer la fin de la semaine : Neige franchit un cap important en devenant adolescente. Son passage à cet âge charnière marqua une nouvelle étape dans leur dynamique familiale. Romain voyait en elle un mélange subtil de douceur et de détermination, une jeune fille qui, malgré les blessures du passé, avançait avec une force admirable.
 
Quant à lui, il réalisa qu’il ne pensait plus à Laure. Pas avec tristesse, pas avec regret. Juste… plus du tout. Le deuil était fait, la page tournée. Il n’éprouvait ni rancune ni nostalgie. Il avait sa famille, ses filles, sa vie. Et cela lui suffisait amplement.




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